du 04.06 au 30.07 2022
La galerie 127 de Marrakech a le plaisir d’accueillir sur ses cimaises, du samedi 4 juin au samedi 30 juillet 2022, la première exposition personnelle du photographe-videaste marocain Ziad Naitaddi.
Observations Hivernales, titre de l’exposition, regroupe un ensemble d’oeuvres, celles-la même qui ont jalonné le parcours atypique de l’artiste, qu’il reformule lui même, a posteriori, comme un puzzle constitué de fragments de vécus.
On ne saurait aborder l’oeuvre de Ziad sans pointer la passion qu’il porte au 7e art : c’est par son « commerce » quotidien, et depuis de nombreuses années, avec les plus grands oeuvres du cinéma international, qu’il se forge une pensée visuelle.
Ziad Naitaddi photographie principalement en noir et blanc et interroge les possibilités expérimentales du médium, allant de l’usage du numérique à celui de l’argentique dont il aime la lenteur du processus, une manière de rester à distance de la surabondance des images qui martellent notre quotidien.
Il lui arrive de ne pas utiliser l’appareil photographique et de s’approprier des archives, des témoignages écrits et oraux ou de revenir – après quelques années- sur ses propres images, qu’il nomme ses errances photographiques.
Il y va de sa pratique comme celle de sa manière de vivre : il arpente, contemple et retranscrit dans des images « mouvantes » et souvent énigmatiques d’autres représentations du Maroc et ses imaginaires.
Ses différentes séries ont pour sujet la migration et ses conséquences, l’éloignement de la terre natale, le sentiment d’exil, l’intégration ou l’exclusion, autant de moment vécus par le photographe lui-même qu’il confronte avec ceux de ces protagonistes. L’intimité qu’il crée avec ces derniers provoque un effet miroir et le ramène à ses propres questionnements sur la manière dont lui même s’est construit et comment il évolue et – finalement – de la difficulté de rendre compte, en images, de ses états d’esprits et émotions intérieures.
« Observations hivernales » est à la fois une « exposition-miroir », elle pose la question de ce qui l’en est du photographe face à son oeuvre, tout en questionnant la possibilité qu’une « confession biographique » puisse inviter à provoquer une réelle identification … Ce puzzle constitué de fragments de vécus, de traversées émotionnelles trouvera t’il âmes soeurs ? cette diffractation permettra t’elle d’estomper leur complexité et de reformuler une identité en perpétuelle mutation ?
L’exposition « Observations hivernales » est composée d’extraits des séries « El Beer » (le puit) réalisée à la Villa Pérochon dans le cadre des Rencontres Photographiques de Niort en 2017, et dont les Inrockuptibles prévoyaient « un avenir radieux » à l’artiste en devenir.
« j’ai senti l’incompréhensible obligation de faire des autoportraits, émotionnellement parlant, dans cet ailleurs – cette nouvelle terre, en « mettant en cadre » d’autres personnes, différentes de moi, de ma culture, de mes traditions, pays et style de vie, dans des atmosphères également différentes mais qui reflètent profondément comment mon âme intérieure aurait pu être traduite atmosphèriquement.»
Untitled Morocco, série au long cours (2015_2018) qui lui a valu d’être lauréat des Nuits Photographiques d’Essaouira en 2017, une première approche du médium photographique qui le mène à appréhender de manière innovante le territoire marocain. Les jeux de regards, les atmosphères parfois étouffantes souvent énigmatiques se mêlent aux architectures à la fois étrangères et familières. Des paysages peuplés par des figures anonymes et mystérieuses, acteurs inconscients de ces scène de théâtre tout en noir et blanc.
Cette série amène l’artiste à chercher les points d’ancrages visuels qui pourraient le mener à s’identifier à un nouveau territoire qui lui était de prime abord inconnu et dans lequel il initie une certaine familiarité.
« Une exploration en guise d’archivage photographique de moments de vie assez doux, tendres mais qui paraissent fugaces ; des états d’âme éternels de personnage face à un quotidien ordinairement maussade. Photographier des personnages mélancoliques, seuls et parfois isolés en essayant de m’éloigner et d’éviter les expressions de visage mais d’exprimer leurs mondes en plans larges, en me servant de l’atmosphère du paysage, l’image, et la monochromie permettant d’aller vers l’indicible, reflétant leur complexités intérieures…«
The absents, est une série en deux actes (The Absent I & II) dont les prises de vues parlent de l’immigration tout en employant le vide, les négatifs, les absences qui semblent hanter les paysages que ceux-ci engendrent : « Vous êtes venus pour prendre des photos de jeunes gens et documenter le problème de l’immigration, mais laissez-moi vous dire quelque chose : Ils sont absents ; ils sont partis travailler ailleurs… Ici, vous ne trouverez rien si ce n’est des femmes, des filles et les plus anciens… Nos jeunes ont dû immigrer. »
Ainsi que « Prologue, 2021, Interlude, 2021, Epilogue, 2021, trois séries, trois axes qui se déroulent comme les différentes parties d’une piece de théâtre, d’un voyage cinématique, au cours duquel intime et politique se rejoignent pour questionner -toujours et encore- la difficulté de rendre compte, par l’image, de l’intensité des émotions ou comment photographier l’inphotographiable ?
L’intérêt des œuvres de Ziad Naitaddi ne repose pas sur une simple prise de vues mais plutôt sur un système où des détails de différents degrés coexistent et se marient pour aboutir à un ensemble dont le but est l’incarnation d’une émotion, une photographie capsule. Un ensemble de pièces d’un puzzle qui permettent une fois réunies d’aboutir à quelque chose d’unique et de très référentiel tout à la fois.
Là ou le cinéma se base sur la maxime “show, don’t tell” qui demande de raconter le propos tenu par l’image et sans passer par un discours explicite, Ziad Naitaddi reprend une équivalence de cette idée dans la photographie en poussant encore un peu plus loin le concept, s’ouvrant ainsi à de nouvelles expérimentations visuelles et plastique.
Des expérimentations auxquelles il procède en souhaitant montrer au spectateur que l’image prise le dépasse de loin : “on montre que c’est plus que ce que l’on peut en penser en tant qu’artiste, que ça dépasse notre propre imaginaire”.
Comment le hors champ, comment ce qui n’est pas montré, comment cette absence-là peut se révéler évocatrice pour le spectateur.
Le cinéma est un des piliers sur lequel se construit une part importante du travail référentiel de Ziad Naitaddi, référence à Uzak de Nuri Bilge Ceylan et le Silence de Bergman, des films et des réalisateurs qui infusent dans la production de Ziad Naitaddi. La sensation de familiarité retrouvée dans des lieux nouveaux, un concept qui trouve aussi sa place dans la photographie tel qu’envisagé par Ziad Naitaddi. Ainsi la fuite en avant constante à laquelle l’être humain se raccroche semble bien vaine … Un « indissoluble processus de renvoi”, un besoin de renouvellement constant qui finit par former une sorte de schéma infini, un ouroboros sans fin.
Né en 1995 à Rabat, Ziad Naitaddi est un artiste autodidacte qui vit et travaille à Salé au Maroc.
Il a participé à plusieurs expositions et publications au Maroc et à l’étranger – au Centre d’Art Contemporain Photographique – Villa Pérochon, à la 13ème Biennale de Dakar, au 16ème Angkor Photo Festival au Cambodge, Sharjah Art Foundation aux Émirats Arabes Unis ou encore au 18 Marrakech et le Cube à Rabat.
En 2017, il remporte le premier prix du jury du festival Les Nuits Photographiques d’Essaouira.
Ziad Naitaddi est représenté par la Galerie 127.
Attention ! La galerie sera fermée du 5 au 18 juillet 2022
Marrakech
127, Av. Mohammed V, Gueliz / 4000 Marrakech, Maroc
Du mardi au samedi de 11h à 19h, ou sur rendez-vous
From Tuesday to Saturday, 11am to 7pm, or by appointment
+33(0)1 48 95 82 03
+33(0)6 77 71 00 23